Après l'étude PISA : en finir avec les pénuries qui étouffent nos écoles !

28.08.2003

Après le choc qu'il faut espérer salutaire de l'enquête PISA démontrant
- d'une part le faible niveau des compétences acquises dans trois domaines-clé (lecture, mathématiques, sciences) par les élèves de 15 ans fréquentant les écoles du Luxembourg,
- d'autre part le fait toujours supposé, dorénavant établi que nos écoles, au lieu de faire rattraper à nos élèves le retard social, le creusent encore et de manière significative, la langue véhiculaire parlée à domicile revêtant en cela un rôle important sinon prépondérant,
la FGIL et le SEW tiennent à s'associer à tous les vrais défenseurs de l'école publique et de l'égalité des chances qui ces derniers jours ont exprimé leurs préoccupations et leurs craintes devant la dégradation de la situation scolaire dans notre pays.
Les deux organisations se doivent toutefois de souligner par la même occasion que face aux nombreuses insuffisances de moyens tant en ressources humaines qu'en infrastructures, il eût été quelque peu étonnant si les résultats de l'enquête avaient été foncièrement différents.
Depuis des années et sous les Gouvernements successifs de ces dernières 25 années, l'école publique est restée malencontreusement victime de mesures d'austérité que face à la situation budgétaire excellente de notre pays nul observateur de la scène politique ne parvient à comprendre :
- Des centaines de classes, du préscolaire/primaire au secondaire, ne disposent pas d'enseignants qualifiés et face au recrutement toujours insuffisant, la situation a tendance à empirer, notamment au secondaire technique et plus particulièrement au préparatoire.
Le respect et l'honorabilité de la fonction enseignante ainsi atteints, un climat déplorable, peu propice à l'enseignement, s'installe au sein du corps enseignant breveté.
Dans ce contexte, la promesse intempestive d'un engagement à durée indéterminée, sans condition de formation, faite au personnel remplaçant de l'enseignement primaire par le Premier Ministre va à l'encontre des exigences de qualité de l'école et de la formation des formateurs.
- Des milliers d'élèves, entassés avec leurs enseignants dans des containers mal isolés contre le bruit, la chaleur et le froid, respectivement éparpillés entre des bâtisses vétustes et en fin de cycle de vie appelées annexes, se demandent à juste titre par où est passée la grande richesse constamment proclamée du pays dans lequel ils vont à l'école.
- Elèves et enseignants - accablés comme nulle part ailleurs sous une multitude de branches à promotion et objectifs d'enseignement changeants et mal définis - attendent en vain la redéfinition de contenus enfin raisonnables, clairs et précis ne se limitant pas à une formule rétrograde comme "back to basics".
Face à tous ceux qui en ce moment tentent de profiter de l'occasion " PISA " pour faire des enseignants les boucs émissaires d'une politique de l'enseignement ratée, le SEW etet la FGIL expriment leur solidarité avec tous les enseignants qui dans nos écoles et dans nos lycées accomplissent jour pour jour une tâche difficile et ingrate.
La même solidarité va aux jeunes gens qui nous sont confiés et que d'aucuns, allant un peu vite en la besogne, essaient de culpabiliser et de ridiculiser en tant qu'élèves paresseux et incapables mais qui en fait ne sont pour la plupart et comme leurs enseignants que les victimes de l'incessante politique des pénuries, de l'austérité et des réformettes depuis trop longtemps pratiquée dans l'Education Nationale.
Qu'il soit enfin permis, sans vouloir minimiser les importantes informations fournies par l'enquête PISA, d'émettre quelques interrogations sur le déroulement du test et sur certains éléments qui ont manifestement joué en défaveur du Luxembourg, notamment en ce qui concerne le classement par rapport aux autres nations de l'OCDE.
- Dans la très grande majorité des pays, l'on a procédé par petits échantillons d'élèves, avec tout ce que cela implique comme "dérapages" possibles (sait-t-on, par exemple, qu'on a exclu la Hollande des résultats ?), alors qu'au Luxembourg on a soumis aux tests la totalité des élèves, du modulaire au secondaire classique en passant par le secondaire technique et le privé.
- Il est généralement admis que les résultats peuvent sensiblement différer selon la situation matérielle de l'exécution pratique d'une enquête. Dans ce contexte, il importe de savoir qu'au Luxembourg, tous les élèves furent réunis dans de grandes salles de fête ou de sports des lycées, souvent d'ailleurs après un transport effectué depuis les bâtiments annexes, alors que dans les autres pays, ils effectuaient les tests dans leur salle de classe, donc dans leur environnement scolaire habituel.
- Nos élèves étaient les seuls ayant du répondre dans une langue qui n'était pas leur langue maternelle à des questions posées dans une langue étrangère et selon un mode de questionnement qui n'est pas de tradition au Luxembourg.
- En plus, d'un point de vue statistique honnête, il serait beaucoup plus équitable de comparer les résultats des élèves du Luxembourg - pays qui connaît une situation d'immigration absolument exceptionnelle ' à ceux de régions en Europe, voire de quartiers connaissant des taux d'immigration analogues, au lieu de faire la comparaison avec des pays dont les taux moyens d'immigration sont considérablement moindres et où, par conséquent, les problèmes linguistiques à l'école sont plus facilement gérables.
Nonobstant les réserves susmentionnées, la FGIL et le SEW en appellent au Gouvernement et à tous les responsables politiques, de prendre au sérieux les graves déficiences dont souffre notre système scolaire et de se mettre immédiatement au travail pour combattre les injustices inacceptables qu'il produit et reproduit.
Pour assurer une plus grande égalité des chances et améliorer en profondeur la qualité de l'enseignement, il n'y a pas d'autre chemin que celui de doter nos écoles des moyens appropriés. Le temps des pénuries doit avoir une fin !
Les Comités de la FGIL et du SEW/OGB-L