Note du SEW/OGB-L au sujet du rapport "Evaluation et critères de promotion" du CSEN
Après 18 mois de discussions qui ont eu lieu dans un groupe de travail ad hoc - auquel le SEW a participé - le Conseil Supérieur de l'Education Nationale (CSEN) a remis en décembre 2000 à Madame la Ministre de l'Education nationale ses réflexions au sujet de l'évaluation et des critères de promotion dans les écoles luxembourgeoises. Nous publions ci-dessous la note que le SEW a fait annexer à ce rapport à l'occasion du vote par l'assemblée plénière du CSEN.
Partie "Evaluation"
Le SEW partage dans ses grandes lignes le contenu de la partie "Evaluation" du rapport même si de nombreux passages sont encore assez vagues.
Quelques remarques complémentaires, qui se fondent sur la discussion du texte avec nos membres de l'enseignement secondaire et secondaire technique, s'imposent cependant à notre avis:
1. L'évaluation étant directement liée aux contenus des programmes et aux méthodes selon lesquelles ces contenus sont transmis aux apprenant-e-s, il est à notre avis illogique de réfléchir à l'évaluation sans réfléchir auparavant aux modifications qui s'imposent au niveau des programmes et des méthodes d'enseignement!
2. Le manque de rigueur des élèves au niveau du cycle inférieur (cela compte particulièrement pour les élèves de 7e) semble aller croissant ces dernières années. Pour faire suivre sa classe, l'enseignant-e doit par exemple répéter la plus simple instruction plusieurs fois.
Les enseignant-e-s consulté-e-s ont de plus en plus l'impression de ne pas avancer; une démultiplication des contrôles risque de renforcer encore cette impression. Dans tous les cas, faudra-t-il peser très soigneusement le pour et le contre d'une évaluation supplémentaire !
A notre avis, l'amélioration des méthodes d'évaluation, qui s'impose certainement, ne résoudra pas ce problème qui est probablement dû au manque de concentration des élèves et à leur tendance de confondre l'école et la réalité avec un jeu. Une analyse approfondie de la situation s'impose avant de procéder à des changements fondamentaux. À nos yeux, une telle analyse devrait se faire en concertation avec des psychologues et des sociologues, les enseignant-e-s du primaire et du secondaire devant également se concerter sur ce point.
3. Dans le même ordre d'idées, le SEW voudrait souligner que ni l'évaluation formative décrite dans la proposition no 2 (p. 6) comme interactive et centrée sur l'apprenant-e, ni la meilleure méthode d'enseignement ne peuvent remplacer l'effort personnel de l'élève. Apprendre n'est certainement pas toujours une partie de plaisir pour l'apprenant-e. Il s'agit de faire comprendre aux élèves et à leurs parents que cet effort doit être fourni ! À son défaut, un redoublement d'effort de la part des enseignant-e-s n'est autre qu'un travail de sisyphe.
D'autre part, on doit se rendre à l'évidence que le manque croissant de personnel enseignant qualifié, qui se traduit par des effectifs de classe montants et des heures supplémentaires régulières pour les professeurs, ne favorise certainement pas la différenciation de l'enseignement en fonction des besoins spécifiques des apprenant-e-s, ni des contacts plus intensifs avec les parents !
4. Les Commissions Nationales des Programmes auxquelles incombe d'après le rapport (p. 5) "le rôle d'encadrement, d'accompagnement et de médiation" demandent à être réformées d'urgence et fondamentalement. Il convient notamment de définir de manière précise leurs missions, de les faire diriger par des personnes formées et en grande partie libérées d'autres obligations, de mettre à la disposition de leurs membres une décharge appropriée et d'équiper ces Commissions de l'infrastructure matérielle nécessaire (locaux, bibliothèque, secrétariat...). En l'absence d'une telle réforme des CN, une réforme sérieuse des programmes et des méthodes sera à notre avis impossible, vu l'ampleur d'une telle entreprise.
5. La réalisation de maintes propositions du groupe de travail du CSEN demandera que les enseignant-e-s puissent se réunir en séances de concertation avec leurs collègues et qu'ils/elles puissent participer à une formation continue en matière d'évaluation.
Afin de permettre aux enseignant-e-s de pouvoir en profiter sans négliger leur travail scolaire quotidien, ce travail de concertation et de formation continue est à intégrer dans leur tâche !
Partie "Critères de promotion"
Les critères de promotion sont étroitement liés au système d'évaluation qui découle lui-même du contenu des programmes et des méthodes suivant lesquelles ce contenu est transmis aux élèves.
Il s'ensuit qu'une sérieuse réforme des critères de promotion n'est envisageable, aux yeux du SEW, qu'une fois les réformes des programmes, des méthodes d'enseignement ainsi que du système d'évaluation réalisées.
Le SEW avait déjà cette position lors de la réforme des critères de promotion dans l'EST il y a quelques années. Selon les responsables du ministère il y avait alors une situation d'urgence; il fallait agir vite, pour ne réaliser la réforme des contenus - tout aussi nécessaire à leurs yeux qu'aux nôtres - que dans une deuxième étape ... le problème c'est qu'elle n'est pas encore réalisée, voire même sérieusement entamée à l'heure actuelle !
En d'autres termes, et c'est précisément, à notre avis, le problème dans ce dossier: parmi toutes les réformes, c'est bien celle des critères de promotion qui se fait le plus facilement, du moins s'il s'agit de changer simplement les règles du jeu au niveau des notes obtenues.
Une réforme en profondeur nous paraissant donc impossible à réaliser à l'heure actuelle et toute modification se résumant forcément à une adaptation d'un système insatisfaisant en soi (même s'il contient de bons éléments, comme la possibilité de compensation par exemple), le SEW propose:
- à moyen terme:
de discuter comment et dans quels délais mettre en oeuvre une réforme des programmes, des méthodes d'enseignement ainsi que du système d'évaluation et des critères de promotion qui en découlent.
- à court terme:
d'adapter de manière très sommaire, en attendant ces réformes, les critères de promotion en vigueur afin d'en éliminer les inconvénients les plus frappants qui sont souvent causes d'échecs ultérieurs (p.ex. dans le cycle inférieur de l'ES, la possibilité de compenser 2 notes insuffisantes avec une moyenne de seulement 35 points).
De manière générale, le SEW est d'avis qu'il est primordial que les critères de promotion soient le plus transparents et le plus simples possible, au service, précisément, des apprenant-e-s et de leurs parents, mais aussi des enseignant-e-s! Il est important pour des enfants et des jeunes de pouvoir comprendre à tout moment de l'année scolaire comment se présentent leurs chances de réussir l'année scolaire.
C'est là une des raisons qui nous empêchent de nous prononcer en faveur de la proposition de règlement de promotion de la FEDUSE/Enseignement. Nous pensons en effet que cette proposition rend plus opaque encore la décision de promotion pour les élèves et leurs parents. D'autre part, nous craignons que la relativisation de la valeur des notes n'engendre un risque de discrimination incontrôlable au niveau de la promotion des élèves.
Ainsi, tout en admettant que les résultats des tableaux de calcul inhérents à cette proposition puissent servir de support à une discussion à l'intérieur du conseil de classe et/ou avec les élèves et leurs parents, nous nous prononçons contre leur utilisation comme élément de promotion.
Luxembourg, le 12 décembre 2000
SEW/OGB-L