La nomination étatique des instituteurs et institutrices (Journal 4/2007)

05.10.2007

La loi concernant le personnel de l'enseignement fondamental présente la nomination étatique des instituteurs comme ayant de nombreux avantages dont notamment la simplification de la procédure de nomination et d'affectation, l'élimination du statut équivoque de la fonction d'instituteur, la clarification de la structure hiérarchique et l'abolition des démarches d'embauche éprouvées parfois comme humiliantes par les candidats. Voilà des arguments qui ont amené un certain nombre de nos collègues à être favorables à une telle nomination étatique.

Le SEW/OGBL a toujours été hostile à une nomination étatique en argumentant que les désavantages pourraient bien prévaloir sur les avantages. Malheureusement, l'actuel projet de loi dépasse de loin nos pires appréhensions:

Ce qui était à prévoir, c'est que les engagements de personnel seront désormais autorisés par la loi budgétaire (article33) comme c'est le cas pour les enseignants du secondaire et le personnel de l'EDIFF avec les pénuries planifiées que nous connaissons. Or, il est tout à fait symptomatique qu'au moment où la pénurie due au numerus clausus de l'accès aux études est en train de se résorber, un nouveau verrou est mis en place pour empêcher que le recrutement d'instituteurs corresponde effectivement aux besoins. Désormais les communes devront donc tenir compte pour l'établissement de leurs organisations scolaires d'un contingent de leçons d'enseignement mis à leur disposition par le ministre. Voilà qui fera passer les calculs budgétaires avant les préoccupations pédagogiques et les besoins ressentis sur le terrain. Les perdants sont tout d'abord les autorités communales qui perdent une part importante de leur autonomie, les élèves en difficulté qui ont besoin d'un encadrement plus poussé et en fin de compte les enseignants confrontés à des effectifs de classe importants ne permettant pas un travail satisfaisant.

Pour ce qui concerne l'abolition des démarches d'embauche, l'article 17 nous renseigne qu'il ne s'agit là que de la première affectation à un poste qui sera prononcée par le ministre sur base d'un classement national et des préférences exprimés par les candidats. Lors d'une demande de réaffectation, le conseil communal “choisit entre tous les candidats intéressés suivant les règles tracées par les articles 19 et 32 à 34 de la loi communale et sur base d'un classement établi par l'inspecteur d'arrondissement”. Voilà que les démarches d'embauche gagneront probablement en importance.

Malheureusement l'article 19 nous apprend qu'il y a pire: “Le ministre ou la ministre peut réaffecter dans l'intérêt du service ou à la demande d'un conseil communal, prononcée sur demande écrite et motivée de la commission scolaire, un instituteur ou une institutrice d'une commune dans une autre, l'intéressé entendu en ses observations. Le ministre ou la ministre en avise préalablement les communes concernées”. Voilà pour ceux qui croyaient que la hiérarchie et les procédures disciplinaires allaient être clarifiées. L'instituteur restera donc exposé à des sanctions supplémentaires à celles fixées par le statut général des fonctionnaires de l'Etat. Car une telle réaffectation aurait certainement des conséquences néfastes sur les conditions dans lesquelles la personne concernée exercera dorénavant sa profession. Comment pourrait-on préserver l'autorité indispensable à l'exercice de la profession après un tel désaveu ? Il est d'ailleurs difficile d'imaginer les motifs d'une telle réaffectation: Est-ce qu'il est possible qu'un enseignant fasse un travail valable dans une commune x alors que la commune y doit absolument s'en débarrasser?

L'instituteur et l'institutrice n'ont donc rien à gagner dans cette affaire de nomination étatique, tout au contraire, ils y ont beaucoup à perdre.