Communiqué sur la réforme projetée du stage pédagogique

27.08.2003

C'est sous la forme d'une "Note concernant la réforme du stage pédagogique" que le ministre de l'Education nationale vient de présenter son projet de réforme de la formation initiale des professeurs.
Bien plus qu'une note, ce document de 24 pages propose de remplacer le stage professionnel actuel d'une durée de trois ans par une formation biannuelle dispensée par une institution autonome dans le cadre du CUL.
Le mémoire scientifique serait remplacé par un rapport pédagogique et le concours d'admission dans la profession aurait lieu à l'issue de la formation.

Dès à présent, le comité du département secondaire du SEW entend préciser sa position de fond face à ce document:

1. Les discussions avec le Ministre actuel de l'Education nationale sur la réforme du stage pédagogique des professeurs de l'enseignement secondaire et supérieur, qui durent depuis deux ans, ont abouti à une grande convergence de vues quant aux contenus de la formation future.
Tous les syndicats d'enseignants concernés - APESS, FEDUSE-CGFP et SEW-OGBL - soutiennent l'idée d'une réforme fondamentale des contenus en fonction des nouvelles exigences du monde de l'éducation.
Leurs propositions concernent notamment:
- la réorganisation, suivant un concept global, de la première année du stage, qui devrait être vouée à l'acquisition d'un savoir psycho-socio-pédagogique de base et de notions méthodologiques fondamentales, et au cours de laquelle les stagiaires devraient rester libres de toute tâche d'enseignement;
- la formation des formateurs, qui devront être eux-mêmes formés au niveau de la théorie en pédagogie, psychologie, sociologie et didactique;
- les épreuves d'examen, dont les objectifs et les modalités sont à revoir en profondeur afin de leur donner une orientation plus proche d'une pratique pédagogique authentique.
Ce n'est qu'au niveau du mémoire que des différences fondamentales subsistent; le SEW plaide pour un rapport pédagogique, contrairement à l'APESS et à la FEDUSE, qui continuent de prôner le mémoire scientifique.

2. Alors que plus rien ne s'oppose maintenant à la mise en oeuvre de la réforme des contenus du stage - souhaitée par le Conseil supérieur de l'Education nationale et les différents syndicats d'enseignants -, voilà que le Ministre sort de sa manchette un modèle tout à fait nouveau, jamais discuté jusqu'à présent et qui met la structure et non les contenus du stage au centre de la discussion.
Mis à part le caractère très contestable de cette façon de procéder, la réforme des contenus risque une fois de plus d'être reportée aux calendes grecques.
Car dans la tradition de Monsieur le Ministre Marc Fischbach, sa "Note" décrit une réforme apparemment totale mais concrètement embryonnaire: l'Institut de formation autonome reste à créer dans le cadre de la réforme future de l'enseignement supérieur; rien n'est dit sur le déroulement de la nouvelle formation, ni sur le statut de ses sujets, ni sur la formation des formateurs, ..., bref, nous voici devant un texte qui ne fait qu'esquisser des idées générales sans se soucier du détail.

3. Plutôt que d'une réforme du stage pédagogique, il s'agit en fait d'une abolition du stage pédagogique !
Les stagiaires du stage actuel deviendraient des étudiants non rémunérés (!), dans l'expectative anxieuse d'un concours qui, après 6 (six !) années d'études déciderait de leur avenir professionnel.
Un tel prolongement des études et leur "couronnement" par une issue incertaine rendraient sans doute l'apprentissage du métier de professeur prohibitif pour bon nombre d'étudiants et augmenteraient la sélection sociale.
Les arguments invoquées dans la "Note" pour justifier ce changement de structure, lourd de conséquences, sont peu convaincants et n'expliquent pas l'engagement du Ministre pour ce nouveau modèle:
- La directive 89/48/CEE relative à la reconnaissance mutuelle des diplômes d'enseignement supérieur ne s'oppose nullement à l'organisation d'un stage professionnel ni à l'organisation d'un examen-concours pour l'entrée dans ce stage; la pratique française (CAPES avant stage professionnel) est là pour le prouver.
La directive ne fait que garantir l'admissibilité à cet examen-concours des citoyens européens détenant des diplômes comparables. Quant à ceux qui disposeraient déjà d'une expérience professionnelle dans un autre pays de l'UE, on devrait les libérer éventuellement du stage, mais non du concours d'admission à ce stage.
D'ailleurs n'est-ce pas ceci la voie qui vient d'être choisie par le même Ministre (en sa qualité de Ministre de la Fonction publique, cette fois) pour les autres catégories de futurs fonctionnaires luxembourgeois ?! Pourquoi alors veut-il traiter différemment les futurs professeurs ?
- Le reproche fait au stage actuel, de charger des stagiaires en voie de formation de la responsabilité d'une classe (reproche que le SEW partage depuis longtemps) devient caduc du fait de la proposition de réforme commune des syndicats d'enseignants visant à décharger le stagiaire de toute tâche d'enseignement au cours de la première année du stage et à le placer sous la responsabilité d'un tuteur pendant les deux années suivantes.

4. Y aurait-il alors d'autres raisons que celles citées dans la "Note", qui pousseraient le Ministre à vouloir changer si radicalement la structure de la formation des professeurs ?
Son récent propos lors d'une émission de radio, que l'environnement actuel du stage ne serait pas propice à favoriser un changement de mentalité ("fir en Emdenken zu förderen") parce que les stagiaires actuels seraient déjà pratiquement sûrs d'avoir un emploi ("praktesch schon ofgesëchert") nous donne à réfléchir sur les objectifs réels de la réforme projetée.


Disons-le clairement: Le SEW-OGBL, qui depuis sa fondation a fait de la réforme en profondeur du stage pédagogique une de ses priorités, n'admettra pas qu'on joue avec la sécurité sociale de ses futurs collègues !
Par conséquent, nous refusons aussi bien un concours d'admission à la profession en fin de formation que son corollaire, qui est la transformation du stage en une formation non convenablement rémunérée
Le reste est négociable, mais nous conseillons au Ministre de faire vite: le temps presse !

Le comité du département secondaire du SEW-OGBL