Cléricaux et libéraux main dans la main au détriment de l'école publique
Décidément, la Ministre de l'Education Nationale et le gouvernement n'ont cesse de jouer les écoles privées et/ou cléricales contre l'école publique ! Après la loi sur la reconnaissance du Bac International privé au même titre que l'examen de fin d'études secondaires public, après le règlement sur l'abolition de la dispense et l'introduction d'un coefficient pour I'instruction religieuse et morale, voici à présent le projet de loi modifiant la loi du 31 mai 1982 concernant les relations entre l'État et l'enseignement postprimaire privé.
Ce projet a été approuvé par le conseil de gouvernement du 19 juillet 2002; en gros, il s'agit d'augmenter le financement des écoles privées par l'Etat. Dorénavant, celles-ci ne bénéficieront pas seulement d'aides publiques à leurs frais de fonctionnement, mais verront l'État participer aussi à leurs frais d'entretien et à leurs investissements nouveaux. D'autre part, les aides publiques ne reviendront plus seulement aux établissements privés qui appliquent les programmes de l'enseignement public luxembourgeois (communément appelés « Nonneschoulen »), mais encore - dans une moindre mesure - à celles qui tout en n'appliquant pas ces programmes, conduisent leurs élèves à un diplôme officiellement reconnu ou menant au prochain ordre d'enseignement dont l'examen de fin d'études est sanctionné par un diplôme officiellement reconnu. Serait couvert par cette formule notamment l'International School, dont le Bac International vient d'être reconnu.
Concrètement,
- pour les frais de fonctionnement, le taux de la contribution étatique serait compris entre 40 et 90% du coût de l'élève de l'enseignement public lorsqu'il s'agit d'établissements appliquant les programmes de l'enseignement public et d'un maximum de 40% lorsqu'il s'agit d'écoles n'appliquant pas ces programmes ;
- pour les frais d'entretien des immeubles, le taux de subventionnement serait fixé selon des modalités analogues à celles de la loi relative aux relations entre l'État et les organismes sociaux, familiaux et thérapeutiques lorsqu'il s'agit d'écoles appliquant les programmes de l'enseignement public; quant aux établissements n'appliquant pas les programmes de l'enseignement public et bénéficiant actuellement de la mise à disposition gratuite par l'État d'immeubles scolaires, le projet ne prévoit pas de subventions dans ce domaine ;
- pour les frais d'investissement, le projet de loi prévoit des subventions de 80 %.
Le SEW/OGB-L tient à marquer une nouvelle fois son opposition catégorique au financement des écoles privées par les deniers de l'Etat, qu'il s'agisse de dépenses de fonctionnement ou à plus forte raison, de dépenses d'investissement. Il est évident pour nous que de telles mesures pénalisent l'école publique - à moins que notre Ministre des Finances ne prouve qu'un Euro puisse être dépensé deux fois ! A long terme, une telle politique conduira à une bipartition de notre système d'enseignement avec deux ensembles d'infrastructures, deux corps d'enseignant(e)s et deux systèmes d'évaluation.
Le coût démesuré de deux systèmes d'enseignement - privé et public - parallèles dans un pays par surcroît aussi petit que le nôtre et le risque d'une société duale qui en résulte semblent se justifier aux yeux du parti chrétien-social par le fait que les écoles privées luxembourgeoises sont essentiellement des établissements dirigés par des communautés religieuses.
Quant à la Ministre de l'Education Nationale, elle paraît prête à sacrifier l'enseignement public sur l'autel de l'idéologie libérale prônant le marché de l'éducation et la concurrence.
Posons-lui dès à présent la question, si les écoles confessionnelles, qui ne comptent pas le cours de Formation morale et sociale dans leur offre scolaire, seraient à considérer comme des établissements appliquant les programmes de l'enseignement public ?
Guy Foetz