Avis du SEW sur l'LAML

Avis du SEW sur l'avant-projet de loi portant création d'un établissement d'enseignement secondaire et secondaire technique au site "Geesseknäppchen" à Luxembourg-Ville
Préambule
L'ancien gouvernement avait attendu la fin de la législature pour présenter un avant-projet de loi qui proposait de combiner la création du nouveau lycée au campus "Geesseknäppchen" et la mise en place d'un Service de gestion des installations communes aux établissements scolaires du site, avec deux orientations tout à fait nouvelles pour notre système scolaire, c'est-à-dire la reconnaissance du diplôme du Bac International et la création de classes à régime linguistique particulier. Les controverses au sujet de ces deux orientations avaient fait traîner le projet, de sorte que la nouvelle ministre de l'Education nationale a hérité d'une situation cocasse: voilà enfin un nouvel établissement postprimaire sera techniquement prêt à ouvrir ses portes en septembre, alors que rien n'a été assuré d'un point de vue administratif ! A peine neuf mois avant l'ouverture officielle, il n'y a encore ni loi permettant de nommer la direction, le corps enseignant et le personnel technique du nouveau lycée, ni projet d'ensemble visant à y attirer des élèves. Fallait-il une preuve de plus pour démontrer l'incompétence notoire des responsables de l'ancien MENFP !
Il s'agit à présent de parer au plus pressé et d'éviter que les nouvelles salles de classe restent inoccupées en septembre 2000, alors que dans d'autres lycées et lycées techniques l'enseignement se déroule en conteneur !
L'ancien avant-projet a par conséquent été scindé en trois avant-projets distincts :
1. avant-projet portant création du nouveau lycée d'après l'article 44 de la loi modifiée du 10 mai 1968 et regroupant les dispositions non controversées de l'ancien avant-projet; cet avant-projet sera déposé à la Chambre des Députés le plus rapidement possible, sans le soumettre à nouveau pour avis aux différents partenaires scolaires,
2. avant-projet portant création d'un Service de gestion ayant pour mission la gestion des installations communes aux établissements scolaires du "Geesseknäppchen; puisque cet avant-projet comportera certaines modifications par rapport à l'avant-projet initial - notamment la création d'un établissement public (soit une privatisation de services publics ?!) -, il sera transmis pour avis aux partenaires scolaires,
3. avant-projet concernant la création de classes à régime linguistique particulier et de classes menant au Baccalauréat International ainsi que la reconnaissance de ce diplôme; cette problématique sera rediscutée avec les partenaires scolaires après la mise en vigueur des deux avant-projets précités.
Dénomination du nouveau lycée
Le nouvel établissement sera dénommé "Lycée Aline Mayrisch", d'après l'épouse philanthropique de l'ancien directeur paternaliste de l'ARBED. Voici enfin le premier lycée luxembourgeois qui portera le nom d'une femme(*) - ou plutôt du mari de celle-ci. Son vrai nom "de Saint-Hubert" n'a pas été retenu pour éviter qu'il y ait confusion et qu'on ne situe le nouveau lycée en Belgique.
Structure du nouveau lycée
Le nouveau lycée, prévu pour 1350 élèves, regroupera 34 à 38 classes des deux cycles de l'enseignement secondaire et environ 18 classes du cycle inférieur de l'enseignement secondaire technique, dont 6 pour le régime préparatoire. Ce choix restrictif résulte surtout de l'absence de salles spécialisées (ateliers) et des limites de capacités des bâtiments. La possibilité d'inclure à long terme des classes de 10e et 11e de l'EST ne nécessitant pas de salles spécialisés reste toutefois ouverte dans le texte.
La proposition d'ouvrir ce lycée aux deux ordres d'enseignement, y compris le régime préparatoire, est intéressante et positive à nos yeux.. Il serait souhaitable qu'en-dehors du régime modulaire, toutes les classes (théorique, polyvalente, pratique) du cycle inférieur de l'EST soient représentées.
Fonctionnement du nouveau lycée
Suivant l'exposé des motifs de l'avant-projet, "d'une année sur l'autre, le nouveau lycée ne pourra recruter à lui seul un tel nombre d'élèves répartis sur toutes les classes (...) ainsi qu'environ 150 professeurs pour assurer cet enseignement. Il est prévu que, dans un premier temps, les lycées et lycées techniques du territoire de la Ville de Luxembourg y envoient des classes qu'ils ne peuvent héberger dans leur propre enceinte et que ces lycées y délèguent également leurs professeurs pour y assurer une partie de leur tâche." Et de poursuivre: "Ainsi, les élèves des classes provenant d'autres lycées garderont un certain nombre de professeurs qu'ils connaissent et obtiendront des bulletins et le cas échéant des diplômes de fin d'études secondaires de leur lycée d'origine. (...) Par ailleurs, pour garantir un bon fonctionnement des études et un maintien indispensable de la discipline, les directeurs des lycées d'origine délégueront au directeur du nouveau lycée leur pouvoir d'autorité sur les élèves et, pour ce qui est des cours qu'ils assurent au niveau lycées, sur les professeurs qui y enseignent"
Existe-il aveu d'échec plus cuisant ? Un nouveau lycée voit le jour, sans qu'on ait pourvu à temps à l'alimenter en élèves et en enseignants !
Si les enseignants sont devenus une denrée rare, de par la politique de recrutement restrictive de nos gouvernements successifs, les élèves sont par contre globalement en surnombre; encore faut-il qu'ils acceptent d'échanger leur position actuelle plus ou moins confortable dans un conteneur contre une place dans l'environnement inconnu du nouveau lycée - question d'image de marque attirante. Or, celle-ci reste à construire et même si le projet de loi sous revue passe sans encombres, la direction du nouveau lycée - appelée en principe en premier à accomplir cette tâche de longue haleine - pourra être en place au plus tôt au début du 3e trimestre, c'est-à-dire 4 mois seulement avant la rentrée 2000/2001.
Face à cette situation, le SEW/OGB-L invite le MENFPS à prendre l'initiative et à promouvoir dès le début de l'année 2000 le nouveau lycée: campagne de publicité, journées de portes ouvertes dès que l'état du chantier le permet, ...
En effet, tout en étant conscients que l'affaire est très mal engagée, nous pensons qu'il faut tabler sur une population scolaire et un corps enseignant intrinsèques et réduire pour autant que possible l'admission de classes et d'enseignant(e)s extérieur(e)s. D'une part, leur présence crée des problèmes énormes tant au niveau de l'organisation des horaires et des déplacements des enseignant(e)s que de la discipline des élèves (surtout si les directions des autres lycées et lycées techniques profitaient de l'occasion pour se débarrasser d'élèves encombrants); d'autre part, elle risque de bloquer à moyen et à long terme l'affirmation d'une "personnalité 5e lycée."
Pour donner une identité à ce lycée, il est urgent de nommer un corps enseignant propre à cet établissement en respectant les principes en vigueur pour les mutations. Or, l'avant-projet ne mentionne nulle part le recrutement des enseignants.
Remarques finales
Un problème grave n'a pas été abordé dans l'avant-projet; celui du transport et du stationnement dans le quartier, engendré par les 1.350 élèves supplémentaires. que prévoit-on à cet égard ?
Espérons en fin de compte que pour le projet "Lycée de Mamer", le MENFPS tirera les leçons du manque de préparation actuel et qu'il commence à poser dès maintenant les premiers jalons pour éviter qu'une situation pareille ne se reproduise !
SEW/OGB-L Luxembourg, le 13 décembre 1999