Diete syndicale du 8 décembre 2008





RESOLUTION 2008
Le budget de l'Education nationale
La Diète syndicale du SEW/OGBL rappelle les déclarations du gouvernement que l'Education nationale est un élément stratégique de sa politique économique et sociale. Or elle constate
- que contrairement à ces déclarations, le budget des dépenses courantes du MEN accuse depuis des années un retard persistant par rapport au budget des dépenses courantes total de l'Etat,
- que si le budget du MENFP proposé pour 2009 évolue parallèlement au budget total en matière de dépenses courantes (+6,4 %), il ne tient pas compte d'une augmentation de 1,9 % du nombre des élèves,
- que les charges du personnel sont en relative diminution depuis des années, malgré l'augmentation constante du nombre des élèves,
- que les plus fortes augmentations de budget reviennent au SCRIPT ou à l'inspectorat, mais pas au fonctionnement des classes,
- que dans ce même budget, la participation de l'Etat aux frais des écoles privées s'accroît de 7,5%.
La réforme de l'enseignement et les conditions de travail des enseignants
La Diète syndicale du SEW/OGBL estime que cette réforme, annoncée depuis plusieurs décennies, est entamée par des ministres successifs doit être menée à bien car elle est indispensable pour le développement de l'école luxembourgeoise.
Malheureusement les textes de loi actuellement discutés à la Commission de l'Education de la chambre des députés contiennent autant de menaces que d'espoirs pour l'école publique. Parmi les menaces, il faut relever l'étatisation avec son cortège bureaucratique concernant les nominations et les contingents de leçons d'enseignement attribuées aux communes. Parmi les espoirs, la création d'équipes pédagogiques et multidisciplinaires, ainsi que de comités d'école et de cogestion semble accorder confiance aux acteurs du terrain en élargissant leur rayon d'action et leurs responsabilités. Le modèle est inspiré par les initiatives prises par bon nombre d'enseignants dans certaines communes en créant des comités de cogestion sur base de règlements communaux.
Pour le SEW/OGBL ce recentrage sur les acteurs du terrain constitue l'élément essentiel de la réforme. Ainsi le SEW/OGBL mettra tout en œuvre pour aider la mise en place des différents comités et pour assurer leur fonctionnement. Ceci sera d'autant plus nécessaire que les entraves mises en place pour les empêcher de jouer ce rôle central sont nombreuses.
Ceci commence par la tâche des instituteurs qui aurait été sensiblement élargie à travers la mise en place d'une concertation bien comprise. En imposant en sus la tenue de 54 leçons d'appui annuelles, le ministère a décidément surchargé la barque et elle risque de couler. La surcharge de travail risque d'être évacuée par une concertation bâclée, des préparations rudimentaires et une réflexion évanescente. Le SEW/OGBL avait soutenu le temps de concertation au sein des équipes de même que la consultation des parents d'élèves. Dans les conditions actuelles, il craint fortement pour le sérieux de ce travail.
Si au moins les décharges accordées aux comités permettaient de tenir compte réellement de la charge de travail réelle demandée à ces derniers, on pourrait entrevoir un élément permettant au moins de redresser la situation des enseignants engagés dans l'innovation pédagogique et la gestion des écoles. Or, les décharges prévues au règlement grand-ducal risquent de pénaliser les comités en place depuis longtemps et ayant acquis des moyens de fonctionnement adéquats à travers des discussions approfondies avec leurs autorités communales, tout en accordant aux autres des moyens ne permettant guère un travail sérieux.
Ainsi tout porte à croire que les acteurs seront finalement manipulés par ceux qui en ont les moyens, à savoir :
- l'évaluateur externe de la qualité des écoles,
- l'agence qualité
- l'inspecteur
- des parents avisés, connaissant les résultats des évaluations des écoles.
La Diète syndicale du SEW/OGBL s'oppose vigoureusement à une telle prolétarisation de la profession enseignante. Elle défend le caractère intellectuel de cette profession, quel que soit son champ d'action et l'âge des élèves. En conséquence, elle estime que l'enseignant a besoin d'un temps de réflexion afin de pouvoir fournir des réponses sensées aux différents besoins de ses élèves, aux questions des parents de ses élèves, aux défis de gestion de son école et aux demandes provenant des autorités locales ou nationales.
La Diète syndicale du SEW s'indigne que deux ans après la clôture du dossier « tâche des enseignants du postprimaire », l'accord trouvé entre le gouvernement et les syndicats n'ait toujours pas été traduit dans son ensemble dans l'organisation des lycées et lycées techniques. La Diète syndicale du SEW pense qu'un tel comportement tendant à mépriser la réglementation acceptée d'un commun accord est illégal et qu'il détruit la confiance des syndicats envers le MENFP. Elle demande à Madame la Ministre de l'Education nationale d'insérer sans tarder l'ensemble des dispositions du règlement Grand-ducal du 24 juillet 2007 dans l'instruction ministérielle correspondante adressée aux directions des établissements postprimaires.
Elle invite les militants du syndicat à continuer à se battre pour des conditions de travail équitables, pour toutes les catégories professionnelles qui travaillent au contact direct avec les jeunes: les instituteurs, les professeurs, les éducateurs et les éducateurs gradués.
Le recrutement de personnel qualifié
Si le recrutement d'enseignants qualifiés pour l'enseignement fondamental s'est amélioré au cours des dernières années, il risque d'être compromis à nouveau avec l'étatisation. Le recrutement des enseignants ne pouvant plus être effectué par les communes selon les besoins réels constatés sur le terrain, mais à travers un contingent de leçons d'enseignement qui leur sera attribué par le MENFP.
Au niveau de l'enseignement secondaire, le manque d'enseignants qualifiés reste le problème primordial. En refusant d'adapter le programme de recrutement conformément aux recommandations de la commission d'experts du rapport de planification, le gouvernement continue de miser sur le recrutement de nouveaux chargés d'éducation non qualifiés, sur l'accroissement des effectifs de classe et sur l'augmentation de la tâche des enseignants.
La Diète syndicale du SEW refuse ces issues nuisibles tant pour la qualité de l'enseignement que pour les conditions de travail des enseignants. Elle exige que le nouveau programme de recrutement quinquennal tienne compte des besoins réels et qu'il soit donc fortement augmenté !
Des chantiers importants, comme l'introduction de l'enseignement par compétences et la réforme de l'enseignement des langues ne peuvent être menés à bonne fin à défaut de personnel qualifié nécessaire.
La Diète syndicale su SEW/OGBL insiste qu'il est urgent de réformer l'examen-concours et de rendre plus attractif le stage des professeurs de l'ES et de l'EST.
La Diète constate que des revendications détaillées du SEW à ce sujet sont en possession de MEN depuis des mois. Elles visent dans l'ensemble :
- à recruter au niveau d'un master académique disciplinaire avec 300 ECTS
- à réorganiser l'examen-concours et le stage et le rendre plus attractif
- à valoriser le stage et réformer son contenu.
La Diète syndicale du SEW demande au MENFP et au gouvernement d'ouvrir sans tarder un dialogue honnête sur ces revendications !
Pour la formation continue des instituteurs, la Diète syndicale du SEW/OGBL insiste sur la mise en place d'un master en Sciences de l'Education.
Par ailleurs, le fonctionnement des équipes multidisciplinaires demande le recrutement d'acteurs autres que les enseignants, notamment des éducateurs et des éducateurs gradués. Le SEW/OGBL souligne que la mission psycho-pédagogique de ces professionnels dans les écoles doit être clairement définie. Ces professionnels devront être recrutés par le MENFP, bénéficier d'un classement au tableau E des carrières des fonctionnaires et disposer des mêmes conditions de travail que les autres enseignants, ce dans l'intérêt bien compris du bon fonctionnement des équipes pédagogiques. De même ils devront disposer d'un interlocuteur qualifié au sein du service de l'éducation préscolaire et de l'enseignement primaire du MENFP, ainsi que de représentants dans les différentes commissions créées par les lois scolaires
La Diète syndicale du SEW/OGBL rappelle que les carrières de l'éducateur et de l'éducateur gradué souffrent depuis longtemps d'un classement qui ne correspond nullement au niveau des études et au degré de responsabilité de ce personnel. Il demande en conséquence un reclassement adéquat des carrières de l'éducateur et de l'éducateur gradué.
Finalement, la Diète syndicale du SEW/OGBL soutient les démarches visant à introduire un Master professionnel en Sciences sociales et éducatives.
L'évaluation des établissements scolaires
En revendiquant une certaine liberté pédagogique, couplée à une responsabilité accrue pour les acteurs du terrain, le SEW/OGBL ne peut s'opposer à un contrôle de l'«output». Les bonnes intentions et les exemples de bonnes pratiques ne peuvent suffire à évaluer la qualité d'une école et il est évident qu'une école doit aussi pouvoir démontrer que ses élèves possèdent les compétences requises par les socles de compétence.
Ceci dit, la Diète syndicale du SEW/OGBL se prononce en faveur :
- d'une évaluation régulière des écoles discutée au préalable avec les acteurs du terrain
- d'une vaste discussion sur les critères à la base de l'évaluation
- d'une évaluation externe des nouvelles initiatives pédagogiques
- d'une évaluation fondée sur les socles de compétences à atteindre par tout le monde
- d'une évaluation s'abstenant d'une mise en concurrence des écoles et d'un ranking (y compris par comparaison à une moyenne nationale)
- d'une évaluation basée sur d'autres éléments que les épreuves standardisées, qui ne sont nullement capables de mesurer le travail réalisé avec les élèves
Par ailleurs, elle insiste sur le fait que le travail de l'enseignant contient l'évaluation des compétences des élèves, mais nullement l'évaluation de la qualité des écoles. Toute activité de passation de tests externes, de même que toute activité d'évaluation et d'encodage des résulats de ces tests pose problème dans la mesure où le temps d'enseignement ne comprend nullement ces activités d'évaluation. Par ailleurs, ces activités viennent perturber le déroulement des apprentissages et leur envergure doit être aussi limitée que possible.
Le SEW/OGBL demande une réflexion approfondie sur les méthodes d'évaluation afin d'éviter les conséquences néfastes telles
- qu'un « teaching to the test » qui néglige tous les aspects de l'apprentissage qui ne se prêtent pas à une standardisation
- qu'une concentration sur les compétences des élèves les plus prometteurs pour faire augmenter le score moyen de la classe.
Par le choix de ses questions, l'évaluateur externe risque de dominer les objectifs de l'école. Il pourra favoriser certaines approches pédagogiques par rapport à d'autres. Pour préserver les objectifs et les valeurs de l'école publique ainsi que la liberté pédagogique, le contenu des épreuves doit pouvoir être discuté. Les valeurs et les objectifs ainsi que les méthodes pédagogiques ne peuvent en aucun cas être fixés ni par l'évaluateur externe, ni par l'agence qualité.
Enseignement des valeurs (Werteunterricht)
La Diète syndicale du SEW/OGBL demande l'introduction d'un enseignement des valeurs unique pour tous les élèves sur la base de la déclaration universelle des droits de l'homme. L'instruction religieuse fait partie du domaine du privé et n'a pas sa place dans l'école publique. Il ne devrait pas y avoir de séparation des élèves d'après leurs croyances religieuses. L'école publique risque de perdre son rôle d'intégration de tous les élèves.
Réforme de la formation professionnelle
La Diète syndicale du SEW constate avec amertume que la réforme de la formation professionnelle ait passé la Chambre des Députés sans qu'il ait été tenu compte des réserves et appréhensions émises par le SEW, face
- à la professionnalisation de la formation du technicien et la disparition de l'accès direct aux études supérieures des détenteurs de ce diplôme
- à l'organisation modulaire tous azimuts des contenus des formations
- au retour au modèle de l'école professionnelle d'il y a 25 ans, nullement adapté au développement technologique et social actuel.
La Diète craint que les nouvelles dispositions légales ne mettent en péril les perspectives professionnelles des élèves de l'EST et qu'elles nuisent gravement à l'avenir économique du pays.